Allô 119 enfance en danger, J’écoute ! Un professionnel du Service National d’Accueil Téléphonique de l’Enfance en Danger répond à nos questions.
Le 10 juillet 1989, les parlementaires ont voté une loi relative à la prévention des mauvais traitements infligés aux enfants. Diverses réformes relatives à la protection de l’enfance ont permis la création du Service National d’Accueil Téléphonique pour l’Enfance en Danger communément appelée ALLO Enfance en Danger.
Ce service bénéficie d’un numéro d’urgence simplifié à 3 chiffres : le 119. Il est gratuit et accessible via tous les opérateurs mobiles et n’apparaît pas sur la liste des factures détaillées. C’est un numéro national, gratuit qui est joignable 24h24 et 7j/7 où la confidentialité des appelants est assurée.
En cette période de crise sanitaire et de mesures de confinement successives, les appels au 119 ont augmenté de manière significative. En effet, sur la période du 16 Mars 20 au 10 Mai 20 le service a enregistré 1 466 h d’appels supplémentaires.
Nous nous sommes demandé comment prévenir la maltraitance des enfants et nous avons rencontré un écoutant du service.
Béatrice est psychologue et écoutante au Service National d’Accueil Téléphonique pour l’Enfance en Danger, elle répond à nos questions.
Bonjour Béatrice, pouvez-vous nous expliquer tout d’abord quelles sont les missions du SNATED au 119 ?
Béatrice du 119 : Allô enfance en danger répond à 2 grandes missions principales qui sont :
La prévention et la protection des mineurs : Nous accueillons les appels au 119 des enfants victimes ou témoins, ou toute personne inquiète pour un enfant qui pourrait être en danger.
La Transmission de l’information : notre rôle est de transmettre les informations préoccupantes à la CRIP (cellule de recueil des informations préoccupantes) qui est un service du département compétent pour évaluer les situations et prendre la décision des suites à donner
Qui peut appeler le 119 et dans quel cas appeler ce numéro ?
Béatrice du 119 : Dans l’absolu, toute personne inquiète pour un enfant peut appeler le 119.
Cela peut être des enfants ou des adolescents victimes, témoins, confidents ou simplement inquiets.
Tout adulte inquiet pour un enfant qu’il pense être en danger, ou ayant un doute sur la situation d’un enfant peut nous appeler pour être conseillé, écouté, orienté. Il n’est pas nécessaire de bien connaître l’enfant en question ni de faire partie de la communauté éducative. Cela peut être un membre de la famille, un ami, un voisin, un animateur ou un éducateur.
Qui répond aux appels ?
Béatrice du 119 : Nous sommes 45 écoutants, tous professionnels de l’enfance qui nous relayons pour répondre aux appels 7j/7 et 24h/24. Depuis Mars 2020, nous nous sommes réorganisés pour mettre en place un système de télétravail et augmenter nos capacités de réception des appels. La capacité réactive de l’ensemble des équipes a permis d’assurer une continuité de service sans interruption et sans que le public n’ai à subir de modifications particulières dans le traitement de ses appels.
Quel est le profil des personnes faisant appel au 119 ?
Béatrice du 119 : Le profil des appelant est varié. Cela peut-être un mineur qui appelle pour sa propre situation ou inquiet pour un ami. Un membre de la famille ou un voisin alerté par des hurlements, des pleurs. Cela peut également être un membre de la communauté éducative, professeur ou éducateur…
Combien d’appels recevez-vous chaque jour au 119 ?
Béatrice du 119 : Tout dépend des jours, si c’est le mercredi ou en période de vacances scolaires le nombre d’appels est plus important. En moyenne nous recevons entre 900 et 1000 appels par jour. Cela fait environ 40 000 appels par an.
La mise en place du confinement en Mars 2020 et les campagnes de communication grand public diffusées à la télé et en radio appelant à contacter le 119 en cas de doute ont conduit à une hausse considérable des appels entrants. Si on compare le nombre d’appels entrants avec la période équivalente en 2019, on observe une augmentation de 56, 2 % (62 467 appels entrants en 2019 pour 97 542 en 2020).
Que se passe-t-il quand le 119 reçoit un appel ?
Béatrice du 119 : Tout d’abord, le professionnel au pré-accueil qui reçoit l’appel va vérifier que la situation concerne bien un enfant en danger ou en risque de l’être. Ensuite, il va faire le lien avec un écoutant professionnel de l’enfance qui va évaluer la situation et apporter aide et conseils. Les appels sont confidentiels et durent le temps nécessaire à la personne pour s’exprimer.
L’écoutant va ensuite rédiger un compte rendu d’entretien. En cas de danger, il va se mettre en lien avec la CRIP du département compétent et lui envoyer une information préoccupante. Si cela est nécessaire, il peut également faire appel au service d’urgence pour une demande d’intervention immédiate (police, pompier, Samu).
Quels sont les dangers évoqués par les appelants ?
Béatrice du 119 : Les situations sont diverses et concernent en grande partie des maltraitances psychologiques (menaces, insultes ou harcèlement scolaire), des négligences éducatives ou des conditions d’éducation dégradées. Les cas de violences physiques et sexuelles sont également rapportés ainsi que les violences au sein du couple parental. Des situations où les mineurs se mettent en danger et ont des comportements à risque peuvent être remontées. Souvent une même situation regroupe plusieurs dangers.
Que se passe-t-il à la suite d’un appel au 119 ?
Béatrice du 119 : En fonction de l’urgence, de la gravité des faits rapportés et après évaluation nous pouvons simplement apporter conseils et écoute où orienter les personnes vers une association locale ou une structure adaptée.
Mais si la situation l’exige, nous transmettons l’information préoccupante à la CRIP du département concerné. Les travailleurs sociaux pourront alors mettre en place un travail avec la famille et proposer une aide éducative adaptée. 50% des appels passés au 119 donnent lieu à la transmission d’une information préoccupante et c’est assez stable d‘une année sur l’autre.
Mais parfois cela ne suffit pas et le Juge des enfants doit intervenir pour mettre en place des mesures supplémentaires. Dans tous les cas, le 119 est informé des suites.
Quand faut -il appeler le 119 ?
Béatrice du 119 : Nous considérons qu’en cas de doute et à la moindre suspicion, il vaut mieux appeler le 119. L’appel est gratuit et confidentiel. Tous les écoutants sont formés pour poser des questions aux appelants, guider l’échange et pour évaluer les situations.
En revanche, en cas de danger grave et immédiat il faut impérativement appeler les services d’urgence : Police gendarmerie 17 ou 112, les pompiers 18 ou le Samu 15.
Quel conseil donneriez-vous à une personne qui se pose des questions sur une situation, qui ne sait pas quoi faire ou hésite à contacter le 119 ?
Béatrice du 119 : Nous conseillons aux personnes qui hésitent à nous appeler de visiter le site internet allo119.gouv.fr qui propose des explications et des informations qui pourront peut-être rassurer la personne hésitante.
Si le fait d’appeler le 119 est compliqué pour la personne, le site met également à disposition un formulaire en ligne à compléter en fonction de votre profil (enfant ou adulte). Attention ce formulaire n’a pas vocation à traiter les urgences, dans ce cas il faut joindre les services d’urgence
Merci Béatrice d’avoir répondu à nos questions !
En cas de doute ou si vous êtes victime de violences psychologiques ou physiques vous pouvez appeler le 119 ou remplir le formulaire en ligne : www.allo119.gouv.fr/recueil-de-situation.