Rythmes et rituels, ces outils qui structurent le temps
Puisque nous organisons nos existences autour de la question du temps, il nous est apparu pertinent de faire une petite halte théorique autour de cette question, particulièrement d’actualité en cette période de confinement. Passé, présent, futur, nous nous demandons constamment comment optimiser notre temps, le préserver, bien l’utiliser. Dans un monde où tout semble aller de plus en plus vite (vidéo à la demande, livraison de repas, voyage d’un bout à l’autre du monde…), comment garder pied et accompagner les enfants dans leur développement en respectant leurs rythmes, sans leur imposer le nôtre.
L’importance des repères temporels chez l’homme
L’homme a toujours eu à cœur de se situer dans le temps en matérialisant, par différents moyens et grâce à différents outils, cette notion abstraite. Des cadrans solaires utilisés dans la Grèce antique au IVe siècle avant J.-C., en passant par les traits tirés sur une écorce d’arbre par Robinson sur son île pour marquer chaque jour écoulé, pour finir par les prouesses techniques des horlogers suisses, l’homme a toujours cherché un moyen de mesurer le temps qui passe. C’est ainsi que l’on a vu apparaître au sein de chaque société des événements qui symbolisent le passage d’une période à une autre (la fête du printemps dans les sociétés celtiques, la fête du nouvel an célébrée par de nombreuses cultures, mais pas toujours à la même date, etc.). A moindre échelle, l’homme organise son temps selon deux grands critères : le jour, consacré à l’activité, et la nuit, consacrée au repos. Chacun trouvera ses propres routines pour organiser son temps et se repérer dans celui-ci. D’ailleurs ne dit-on pas “c’est l’heure de…” quand il s’agit de faire quelque chose ? Comme si chaque activité avait un temps dédié pour être réalisée.
Les notions d’espace-temps chez les tout-petits
Mais alors, qu’en est-il pour les enfants ? Comment peuvent-ils élaborer des repères pour se situer eux-aussi dans ce continuum infini ? Nous savons qu’ils ne disposent pas des mêmes avantages que nous. Leur cerveau, qui se développe tout au long de l’enfance et jusqu’au début de l’âge adulte, ne leur permet pas dès la naissance de se situer dans le temps (ni même de se le représenter concrètement). La notion du temps va s’immiscer petit à petit dans le quotidien des enfants jusqu’à ce que leur cerveau soit assez mature pour se la représenter. Mais alors, comment ça marche ? Le nourrisson dans le ventre de sa mère n’attend rien. Il est nourri et se développe jusqu’au moment de l’accouchement. Quand il vient au monde, tous ses besoins ne sont plus satisfaits de façon immédiate. La faim se fait sentir et la réponse n’est plus aussi instantanée qu’auparavant. Petit à petit l’enfant va réaliser qu’il existe une temporalité entre le moment où il exprime son besoin et le moment où celui-ci est satisfait. Ce sont ses premières expériences du rapport au temps. Jusqu’à 3 ans, la notion du temps est abstraite et ne fait pas sens pour un enfant. A partir de 4 ans, il commence à situer un moment privilégié dans la semaine (le mercredi ou le dimanche par exemple). Vers 5 ans, il situe les notions de temps proches comme “demain” ou “hier”. De 6 à 8 ans, ces notions vont se préciser progressivement, de façon exponentielle (jour de la semaine, puis mois, puis année). Enfin, vers 10 ans il est capable de situer le temps à une échelle plus fine en estimant une durée par exemple (en minutes puis en heures).
Le temps de l’enfant est différent du temps de l’adulte
Nous comprenons alors aisément que le temps de l’enfant n’est pas le même que celui de l’adulte et qu’il ne passe pas de la même façon qu’on ait 2 ans et demi ou 37 ans. Il est important de se rappeler cette notion primordiale. Un enfant ne va pas aussi vite qu’un adulte et n’a pas les mêmes préoccupations temporelles. D’autre part, nous ne le répéterons jamais assez, chaque enfant est unique et se développe à son rythme ! S’il met du temps à marcher, qu’à cela ne tienne, il y arrivera en son temps, quand il sera prêt. Vous en conviendrez : l’âge auquel vous avez fait vos premiers pas n’a pas déterminé votre vie d’adulte. Il est donc important de respecter le rythme de chaque enfant, de l’encourager et le soutenir dans ses apprentissages, en se gardant de projeter sur lui nos impatiences.
Les rituels, ces outils pour se repérer dans le temps
Pour aider les enfants à se situer dans le temps, les adultes vont s’appliquer à créer et mettre en place des repères temporels, comme les moments des repas et des soins (souvent à heure fixe). Le fait de verbaliser (c’est-à-dire mettre en mots) certains moments aide les plus grands à développer leur notion du temps. Par exemple, “dans 15 minutes on passera à table”. Plus les journées seront ritualisées, mieux les enfants se situeront dans le temps et auront une maîtrise de celui-ci. Par exemple, lire une histoire avant de s’endormir marque la fin des activités de la journée et annonce le prochain temps qui sera celui du sommeil. A chacun de trouver les siens, pourvu qu’ils puissent aider petits et grands à avancer au jour le jour sereinement sur le chemin de la vie.